19.
Mises à l’épreuve

Suite à la victoire de la Fédération du Commerce au Sénat, Felucia, Murkhana et d’autres anciennes planètes clientes devinrent membres de la République, indéfectibles dans leur allégeance aux besoins de la Fédération du Commerce. Alors que Pax Teem et une poignée de Sénateurs aussi déçus que lui rejetèrent Palpatine, l’accusant – ainsi que Naboo – d’avoir été placé par le cartel, la majorité du Sénat trouvait l’affaire sans importance. Palpatine était un nouveau venu dans le jeu de la politique et exprimait simplement les vœux du Roi Tapalo. En revanche, un argument pesait bien plus à leurs yeux : les sièges attribués à de nouvelles planètes signifiaient de nouveaux revenus et de nouvelles opportunités de pots-de-vin. Ronhar Kim remercia personnellement Palpatine de ne pas l’avoir nommé lors de son discours au Sénat. Le Chancelier Suprême, quant à lui, ému par le plaidoyer de Palpatine, lui envoya un message personnel l’informant qu’il ordonnait au Comité judiciaire d’utiliser ses pouvoirs étendus pour résoudre l’assassinat de Kim.

Plagueis était content de ces résultats. Il ne faudrait pas attendre très longtemps avant que les planètes nouvellement admises au Sénat ne se retrouvent coincées entre la République d’un côté et la Fédération du Commerce de l’autre ; taxées par la première, exploitées par la seconde – tout était en place pour attiser le ressentiment. Les deux Sith ne se réunirent pas en tête à tête mais Plagueis informa son Apprenti qu’il resterait avec les Muuns sur Coruscant, notamment pour assister à l’intronisation de Larsh Hill dans le mystérieux Ordre du Cercle oblique. De nombreux membres de cette confrérie occulte étaient également des habitués des Réunions sur Sojourn.

Pour Dark Sidious, les semaines qui suivirent le vote furent un retour à la normale. Comme le Sénat était toujours en session, il passait le plus clair de ses journées dans la Rotonde et la plupart de ses nuits à explorer Coruscant, souvent en compagnie de Pestage et Doriana. En secret, il poursuivait sa formation Sith, interprétant l’absence de véritables conseils de son Maître comme une invitation à progresser tout seul. Et c’est ce qu’il fit. Il se plongea dans des anciens textes que Plagueis trouvait inintéressants, y compris des traités sur la sorcellerie Sith et la construction d’holocrons.

Vers la fin de la troisième semaine, il fut contacté par un lobbyiste au service d’un consortium énergétique appelé Silvestri Trace Power, plus couramment évoqué par ses initiales : STP. Au cours de plusieurs ! échanges via comlink, le lobbyiste, un Sullustéen, lui fit comprendre clairement que Palpatine aurait beaucoup à gagner en défendant STP au Sénat et suggéra une rencontre pour discuter des conditions. Sidious rassembla des informations sur les origines de STP et il dut fouiller en profondeur pour dépasser les obstacles placés par le consortium pour empêcher ce type de recherches. Il apprit ainsi que STP avait d’abord été une société écran créée par Zillo Fuel Resources et basée sur Malastare.

Soupçonnant un piège, Sidious accepta une réunion en journée dans un lieu qui renforça ses soupçons. Contrairement aux restaurants des niveaux supérieurs fréquentés par des politiques, le Shimmersilk était installé dans un quartier des niveaux inférieurs, surnommé familièrement PRDLU. Pour la plupart ce sobriquet signifiait « Périphérie de l’Uscru » mais pour les individus mieux informés il fallait y lire « Péril de l’Uscru ». La zone s’embourgeoisait lentement, on y accédait via la ligne de Mag-Lev Noyau Profond, qui avait autrefois servi de repaire aux bandes organisées, tueurs en série, agresseurs, voleurs et autres charognards, sur une planète où les bas-fonds étaient exceptionnellement profonds. Comme les résidents s’attaquaient principalement les uns aux autres, la police ne voyait guère de raisons de patrouiller et même les caméras de sécurité étaient rares, car elles étaient souvent volées et démontées pour récupérer les pièces. Le risque de bagarre ou de meurtre attirait tout de même le public de la Rotonde et il n’était pas rare de rencontrer un Sénateur ou un assistant sénatorial qui s’encanaillait dans les quartiers pauvres du PEDLU, se mêlant aux individus louches, consommant des substances prohibées, flirtant avec le danger.

Sidious envisagea de se faire accompagner par Pestage et Doriana mais rejeta l’idée. Comme sa formation officielle avec Plagueis était à l’arrêt, il avait envie de voir de quoi il était capable seul.

Exigu et secoué par le passage fréquent des trains du Mag-Lev tout proche, le Shimmersilk était fréquenté par un public plutôt local. Le lobbyiste sullustéen, comme Sidious, avait opté pour une tenue plus décontractée pour cette rencontre. Il l’attendait à une table dans un coin, dos au mur décoré d’holo-images bon marché. Seules six autres tables étaient occupées – principalement par des couples non-humains. Le service était assuré par trois humains maladroits et un barman dug. Une musique de jatz instrumental, à peine audible, flottait dans une atmosphère qui avait cruellement besoin d’être recyclée.

Sidious prit un air étonné, voire effarouché, en s’asseyant face au Sullustéen. Ils se mirent à parler de façon anodine de l’actualité et d’affaires du Sénat, avant que le lobbyiste n’aiguille la conversation sur la nécessité pour STP d’obtenir l’approbation du Sénat afin d’étendre ses opérations le long de la Route commerciale de Rimma. Ils commandèrent et recommandèrent des boissons et des amuse-gueules. L’intérêt de Palpatine commença à faiblir.

 Je pense que vous surestimez l’intérêt que je peux avoir pour STP, finit-il par dire. Je ne suis rien de plus que la voix du régent de Naboo.

Le Sullustéen balaya d’un geste ces paroles.

 Et moi je crois que vous vous sous-estimez. Votre bref discours au Sénat vous a placé sous les projecteurs, Sénateur. On parle de vous. Silvestri Trace Power pense que vous pouvez être très utile.

 Et pour moi-même, avez-vous dit.

 Naturellement..., commença le Sullustéen mais Sidious l’interrompit.

 En réalité, vous n’êtes pas ici pour me recruter.

Il fit négligemment un geste et répéta :

 Vous n’êtes pas ici pour me recruter.

Le Sullustéen cligna des yeux, perdu.

 En réalité, je ne suis pas vraiment ici pour vous recruter.

 Alors, que faites-vous ici ?

 Je ne sais pas pourquoi nous sommes là. On m’a demandé de vous rencontrer.

 Qui vous a demandé cela ?

 Je, je...

Sidious décida de ne pas lui mettre trop la pression.

 Vous disiez ?

Le Sullustéen cligna à nouveau des yeux.

 Je disais... Qu’est-ce que je disais ?

Ils rirent tous les deux et sirotèrent leurs boissons. Au même moment, Sidious recourut à la Force pour déplacer le tablier d’un des serveurs juste assez pour révéler la crosse d’un blaster de poche que l’homme portait à la taille. Il leva la main pour boire encore une gorgée de son verre et réitéra son geste en direction d’un autre serveur, dont le tablier cachait une arme identique. Elles avaient toutes deux été fabriquées par BlasTech, mais n’étaient pas destinées au marché ordinaire.

La série E 1-9 – la bien nommée Swiftkick, coup rapide – n’était disponible que pour les membres d’élite de Santhe Security, dont le Q.G. se trouvait sur Lianna.

 Je ferais bien de ralentir la cadence, dit-il avec une maladresse feinte. Je crois que la tête me tourne un peu.

L’attitude du Sullustéen changea de façon presque imperceptible.

 Vous devriez manger un peu.

Il glissa un menu sur la table et le poussa vers Sidious.

 Choisissez ce que vous voulez. Le prix n’a pas d’importance.

Il se leva.

 Si vous voulez bien m’excuser un instant, nous commanderons dès que je reviendrai.

Sidious remarqua que le Sullustéen n’était pas le seul à s’être levé. Les serveurs passèrent de table en table, chuchotant des instructions et les clients demandaient l’addition les uns après les autres puis sortaient. Dans quelques instants, il serait le seul client du Shimmersilk. Tandis qu’il se tournait légèrement sur sa chaise pour observer le fond de la salle, un scénario se mit à prendre forme dans son imagination. Le Sullustéen, le lien de STP avec Malastare, les agents de Santhe Security, même le barman dug... Ils n’avaient aucun compte à régler avec lui mais avec Damask Holdings.

On ne lui tendait pas un piège pour l’accuser ensuite de corruption ; une tromperie bien plus sinistre était en train de se dérouler. Son intérêt fut immédiatement piqué au vif.

Il pensa d’abord qu’ils tentaient de le droguer. Ses recherches sur la sorcellerie Sith lui avaient appris à annuler les effets de nombreux poisons et venins communs – une routine qu’il avait exécutée machinalement avant même de s’asseoir à la table. Ils attendaient peut-être qu’il s’écroule et perde connaissance ou qu’il soit secoué de spasmes, l’écume aux lèvres...

Juste au moment où il se disait que ses talents d’acteur allaient être mis à l’épreuve, deux serveurs convergèrent vers lui en montrant leurs armes discrètes mais puissantes.

 Quelqu’un veut vous parler, Sénateur, dit le plus grand des deux.

 Ici ? demanda Sidious d’un air surpris.

L’autre lui indiqua une porte.

 Par ici.

Sidious dissimula son sourire : le Shimmersilk possédait une arrière-salle. Il se leva avec maladresse et se pencha délibérément vers l’un des gardes de sécurité pour évaluer sa température corporelle, son rythme cardiaque et sa respiration.

 Je suis légèrement ivre. Je vais peut-être devoir m’appuyer sur vous.

L’homme eut un soupir exaspéré mais autorisa Sidious à placer un bras sur son épaule.

Comme il serait facile, pensa-t-il tandis que le Côté Obscur commençait à grandir en lui, virulent et affamé, avide de prendre le contrôle de son corps et de se déchaîner, de briser le cou de ces deux hommes, d’arracher leurs cœurs de leurs poitrines, de les projeter contre le mur, de faire crouler sur leurs têtes cet établissement malodorant...

Mais il n’en fit rien. Il devait rencontrer son ravisseur et apprendre le nom des responsables. Il devait prouver à son Maître qu’il était adroit et prudent. Qu’il était un véritable Seigneur Sith.

L’arrière-salle possédait une seconde porte qui ouvrait sur un couloir sombre menant à un vieux turbo-ascenseur. Poussé par les gardes, Sidious calcula la distance qu’ils avaient parcourue depuis le Shimmersilk jusqu’au turbo-ascenseur. Il garda le silence et concentra son attention sur le calcul de leur vitesse d’ascension. Il estima qu’ils avaient franchi cinquante niveaux quand la cabine s’arrêta et les déposa dans un couloir aussi vieux que le premier mais plus large, carrelé et illuminé par des appliques murales.

Il s’agissait peut-être d’un couloir de maintenance pour les monades situées au-dessus, même s’il se trouvait bien plus bas que le sous-sol inférieur. Les hommes de Santhe Security le guidèrent vers le nord, puis ils traversèrent une étendue de sol en permabéton taché et arrivèrent à un carrefour où un speeder à quatre places les attendait, moteur allumé, un Rodien lourdement armé aux commandes.

Celui-là ne fait pas partie de Santhe, se dit Sidious. C’est un mercenaire ou un assassin indépendant.

On le poussa brutalement sur le siège arrière du speeder et on lui ordonna de ne rien tenter d’idiot. Il réprima l’envie de rétorquer que c’étaient eux qui faisaient une bêtise et continua à jouer la victime intimidée, recroquevillé sur son siège, les mains croisées sur sa poitrine, évitant le regard des ravisseurs. Le speeder partit vers l’est à une vitesse modérée jusqu’à la première intersection puis bifurqua en direction du quartier du gouvernement et reprit la même vitesse pendant quelque temps. Sidious estima qu’ils étaient à environ vingt niveaux au-dessous des bâtiments excentrés du Sénat quand le speeder bifurqua vers l’ouest dans un couloir plus large, en direction d’un quartier appelé Les Usines – une sorte de plaine industrielle située bien en dessous du plateau gouvernemental, dominée au nord par le Temple Jedi et les pistes d’atterrissage horizontales du spatioport de Pius Dea et, au sud, par les résiblocs et les tours commerciales du quartier Fobosi.

C’est là que Plagueis assistait à l’intronisation de Larsh Hill à l’Ordre du Cercle oblique.

Le pilote rodien du speeder les laissa devant un turbo-ascenseur antigrav. Sidious faisait semblant de trembler de peur. Il était arrivé à une nouvelle conclusion : puisque ses ravisseurs s’étaient donné du mal pour le garder à l’abri des regards, ils devaient avoir le projet soit de le détenir contre rançon ou de l’exécuter clandestinement, plutôt que publiquement.

L’ascenseur les amena à une zone de chargement à mi-hauteur d’une usine abandonnée, où plusieurs autres gardes attendaient. La lumière du jour pénétrait en diagonale par les longues fenêtres, faisant apparaître des millions de particules de poussière. Un jour, les gangs qui faisaient la loi dans le quartier finiraient par briser les vitres et les morceaux tomberaient sur les objets laissés à l’abandon par les propriétaires de l’usine, lorsqu’ils avaient abandonné Coruscant pour des planètes moins coûteuses dans les Bordures Médiane ou Extérieure. Les ravisseurs de Sidious le forcèrent à s’asseoir sur le corps cylindrique d’un droïde énergétique. Un holoprojecteur portable fut placé devant lui et un réseau de transmission installé sous ses pieds.

L’un des gardes de Santhe passa un moment à activer le projecteur puis s’écarta dès qu’une image bleutée du Sénateur du Protectorat gran, Pax Teem, à taille réelle, prit forme au-dessus de l’appareil. Teem portait une robe richement brocardée et une tunique de soie scintillante resserrée par une large ceinture. La qualité de l’image, nette et stable, laissait supposer qu’elle venait de Coruscant ou d’une planète proche du Noyau, plutôt que de Malastare.

 Nous tenons à nous excuser de ne pas vous avoir proposé un siège plus approprié à votre condition, Sénateur. Le chef de la Maison Palpatine est sans doute habitué à plus de confort.

Sidious n’opta ni pour l’indignation ni pour l’intimidation, il préféra le registre de l’ironie :

 Est-ce maintenant que je suis censé vous demander la raison de mon enlèvement ?

Les yeux protubérants de Teem s’écarquillèrent :

 Cela ne vous intéresse pas le moins du monde ?

 J’imagine que c’est suite à l’abstention de Naboo lors du vote.

 En partie. Vous auriez dû voter comme l’aurait fait votre prédécesseur, Sénateur.

 Ce n’étaient pas mes instructions.

 Oh, j’en suis certain.

Sidious croisa les bras sur sa poitrine.

 Et à part cela, que me voulez-vous ?

Teem frotta avec enthousiasme ses mains à six doigts l’une contre l’autre.

 Cela a moins de rapport avec vous qu’avec les gens que vous servez. D’une certaine façon, c’est une simple question de malchance que vous soyez mêlé à tout cela.

 Je ne crois pas à la malchance, Sénateur, mais je comprends que mon enlèvement soit un acte de vengeance. Vous démontrez ainsi que le Protectorat gran emploie les mêmes tactiques que ceux qui ont ordonné l’assassinat de Vidar Kim.

Teem se pencha vers la caméra qui transmettait son image. La colère déformait ses traits.

 Vous dites cela comme si c’était toujours un mystère alors que nous savons tous les deux que cet assassinat n’a pas été commandité par la Fédération du Commerce mais par votre Maître Muun. Par Hego Damask.

Sidious resta impassible.

 Ce n’est pas mon Maître, Sénateur. En réalité, je le connais à peine.

 Il vous a salué devant le bâtiment du Sénat comme un ami proche.

 Il saluait deux Maîtres Jedi aux côtés desquels je me trouvais.

Teem fendit l’air de son index droit.

 Ne vous imaginez pas qu’un mensonge peut vous sauver. Vous vous connaissez depuis plus de dix ans. Depuis que vous l’avez aidé à garantir l’élection de Bon Tapalo.

Sidious fit un geste détaché.

 La rumeur est vieille et n’a jamais eu aucun fondement, ce sont les rivaux de la Maison Palpatine qui l’ont lancée.

 Vous mentez encore. Vous avez trahi votre père et ses alliés royaux. En échange des informations que vous communiquiez et de l’espionnage que vous meniez pour Damask, il vous a récompensé en persuadant Tapalo de vous nommer Ambassadeur.

Sidious dissimula sa rancœur. Il n’était pas étonné que ses ennemis sur Naboo se soient confiés à Teem. Mais cette révélation le conforta dans sa décision de faire éliminer ces ennemis à la première occasion. Et de s’assurer également que les informations sur son passé disparaissent des archives publiques.

 Ma nomination comme Ambassadeur s’est produite dix ans après les événements dont vous parlez, se défendit-il. J’ai été récompensé pour mes actions politiques.

Teem ricana.

 De la même manière que votre nomination au Sénat était le résultat de vos actions ?

 Parlez franchement, Teem, l’invita Sidious d’une voix calme et menaçante.

Teem eut un sourire amer.

 Vous n’avez peut-être pas été mêlé directement à la mort de Kim, mais je vous soupçonne d’en être complice.

Il fit une pause avant d’ajouter :

 Ce petit discours que vous avez prononcé au Sénat... Je pense qu’il a permis d’attirer l’attention du Chancelier Suprême. Vous avez clairement les talents qu’il faut pour mener une carrière politique. Malheureusement, nous avons l’intention d’y mettre un terme.

Sidious épousseta l’épaule de sa robe :

 Répandez toutes les rumeurs que vous voudrez. Elles seront l’objet de ragots pendant la journée et oubliées le lendemain.

Teem campa ses grosses mains sur ses hanches et rit de bon cœur.

 Vous me comprenez mal, Palpatine. Nous ne voulons pas salir votre réputation ou vous retenir prisonnier contre rançon. Nous avons l’intention de vous tuer.

Sidious mit un moment avant de répondre. Même s’il n’avait jamais connu la panique paralysante et que ses frayeurs n’avaient jamais duré longtemps, enfant, il avait connu la peur, un réflexe conditionné à la menace. Malgré une voix intérieure qui le rassurait en lui promettant que rien ne pourrait lui arriver, il y avait eu, parfois, l’éventualité que quelque chose d’horrible se produise. Plus d’une fois, la main levée de son père l’avait fait reculer. Il avait fini par comprendre que cette voix existait bel et bien et qu’il ne s’était pas fourvoyé en s’imaginant invulnérable.

C’était le Côté Obscur qui lui murmurait que rien ne pouvait lui arriver, précisément parce qu’il était invulnérable. Depuis le début de sa formation, cette voix s’était tue, il l’avait intériorisée. Avant, il aurait eu pitié de Teem en voyant qu’il se croyait plus fort que lui, désormais ce spectacle ne provoquait que colère et haine. L’émotion pure était une conséquence de sa double vie. Même s’il aimait son identité secrète, il avait plus que jamais envie que l’on sache qu’on ne pouvait le traiter à la légère, qu’il détenait l’autorité maximale, que poser un simple regard sur lui équivalait à regarder la matière noire qui englobait et guidait la galaxie...

 Qu’espérez-vous gagner avec ma mort ?

 Puisque vous me le demandez : j’espère débarrasser le Sénat d’un incapable nommé par copinage et envoyer ainsi un message à Hego Damask pour lui faire comprendre que l’époque où il influençait le Sénat est terminée. Nous attendons de pouvoir exercer cette... vengeance, comme vous l’appelez, depuis dix ans. Pour certains d’entre nous, depuis plus longtemps encore. Cela remonte à l’époque où Damask a noué un partenariat avec un Bith appelé Rugess Nome.

L’assassinat de Kerreci Santhe, pensa Sidious.

 Je crains, Sénateur, que vous n’ayez pas mûrement réfléchi votre entreprise.

Le visage de Teem s’empourpra.

 Vous parlez des conséquences, Palpatine ? Ah, mais nous y avons pensé et nous avons pris les précautions nécessaires.

Sidious hocha la tête :

 Je vous donne une dernière chance de revenir sur votre décision.

Teem se tourna vers quelqu’un hors champ et lâcha un gros rire.

 Dites cela à ceux qui ont votre vie entre leurs mains, Palpatine. Et consolez-vous en pensant à tout ce que vous avez accompli au cours de votre brève carrière.

À peine l’holo-image eut-elle disparu que deux hommes de la sécurité foncèrent vers lui. Sidious se prépara à passer à l’action. Un coup de Force les projetterait sur l’holoprojecteur, puis il exécuterait un saut, bras tendus, les mains serrées en griffes, une pour chaque trachée, qu’il arracherait de leurs gorges...

La Force l’interrompit et attira son attention vers les fenêtres en haut du mur.

D’un coup, le son de tirs répétés de blaster et des cris de douleur lui parvinrent de la pièce voisine. Ils furent suivis par un bruit assourdissant de verre brisé, tandis que les Gardes du Soleil passaient à travers les hautes fenêtres et commençaient à descendre en rappel vers le sol encombré. Ils canardaient l’usine en glissant le long de leurs cordes en microfilaments. Ils touchèrent les hommes de Santhe et les Rodiens à tellement de reprises que leurs corps furent déchiquetés par les salves.

D’autres Echanis aux cheveux clairs firent irruption dans le couloir des deux côtés. Certains étaient armés de pics de Force, d’autres de blasters. Sidious n’avait même pas encore bougé un muscle quand une femme aux yeux d’argent se précipita vers lui.

 Vous êtes en sécurité, maintenant, Sénateur Palpatine.

Il lui sourit.

 Je vois ça.

Un Echani se tenait à côté de l’holoprojecteur. À l’aide d’un appareil portable, il extrayait les informations de la machine. Un moment plus tard, une image de Hego Damask vêtu d’une robe de cérémonie apparut à la place de l’image de Teem. Le droïde 1-1-4D était derrière lui.

 Nous avons la source, Magister, dit le Garde du Soleil. Il s’agit de la Station orbitale Panoply.

Damask hocha la tête.

 Rejoignez le reste de votre équipe et donnez l’assaut.

Le Garde du Soleil fit un hochement de tête rapide.

 Dois-je laisser du personnel avec le Sénateur Palpatine ?

 Non. Le Sénateur Palpatine n’a pas besoin de votre protection. Laissez-nous.

Sidious entendit des airspeeders voler autour de l’usine. Sans dire un mot, les Gardes du Soleil quittèrent la pièce en courant.

 Vous me surveilliez de près dirait-on, observa Sidious en s’approchant du projecteur.

Dark Plagueis acquiesça.

 Votre enlèvement était en préparation depuis un moment.

 Depuis que vous avez fait exprès de me saluer ouvertement devant le Sénat.

 Avant cela, même. Veruna m’a prévenu qu’un groupe de nobles mécontents avait pris contact avec le Gran.

Plagueis se tut un instant.

 Vous devriez envisager de faire appel à Sate Pestage pour régler vos comptes avec eux, Sidious.

 J’y ai déjà pensé.

 Quant à notre rencontre publique, j’avais besoin de vous faire briller devant eux.

 Sans m’en avertir.

La rougeur qui était montée au visage de Sidious s’intensifia :

 Était-ce une épreuve de plus ?

 Pourquoi aurais-je besoin de vous mettre à l’épreuve ?

 Vous pensiez peut-être que j’étais tellement séduit par la vie sur Coruscant que je ne sentirais pas le danger.

 Ce n’était clairement pas le cas. J’ai vu que vous en étiez conscient dès le début.

Sidious inclina la tête en un salut respectueux.

 Même en partenariat avec Santhe Security, Teem et les autres Grans sont des amateurs complets, poursuivit Plagueis. Nos agents les ont persuadés d’utiliser la cantina à Uscru et l’usine dans laquelle vous vous trouvez – qui nous appartient, d’ailleurs, à travers un holding qui s’appelle LiMerge Power. En revanche, nous n’avions pas pu déterminer où se réfugieraient les Grans.

 Vous le savez maintenant. Mais pourquoi tellement d’efforts pour leur tendre un piège ? Pourquoi ne pas simplement les tuer ?

 Ce n’est pas une affaire Sith, Apprenti. Pour garder les apparences, nous devons justifier nos actes. Ils n’ont pas compris notre message, nous devons maintenant leur donner une leçon. Mais d’autres personnes doivent être convaincues par notre manière d’agir.

 Comment puis-je vous aider ?

 Vous avez déjà joué votre rôle. Maintenant, reprenez vos activités habituelles. Nous nous reparlerons quand la cérémonie de l’Ordre du Cercle oblique sera terminée.

Sidious garda le silence pendant un long moment avant d’ajouter :

 Ces épreuves prendront-elles fin ?

 Oui. Quand nous n’en aurons plus besoin.

Star Wars - Dark Plagueis
titlepage.xhtml
Dark Plagueis_v6_final_split_000.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_001.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_002.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_003.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_004.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_005.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_006.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_007.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_008.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_009.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_010.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_011.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_012.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_013.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_014.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_015.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_016.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_017.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_018.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_019.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_020.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_021.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_022.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_023.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_024.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_025.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_026.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_027.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_028.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_029.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_030.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_031.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_032.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_033.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_034.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_035.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_036.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_037.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_038.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_039.htm
Dark Plagueis_v6_final_split_040.htm